La semaine dernière nous discutions d'une Russie qui, contrairement à la vision européenne, se sent faible et agressée de toutes parts. Une étude de Dmitri Trenin* découverte ce matin sur le site de l'Institut d'Etudes Stratégiques du Collège de Guerre Militaire Américain, vient appuyer cette assertion.
Le document complet (en anglais) est disponible au pied de cet article, il présente l'avantage d'offrir les points de vue à la fois de Moscou et de Washington sur les intérêts et méfiances que chacun entretient vis à vis de l'autre.
Je vous en propose ici les extraits traduits qui étayent cette thèse d'une peur des élites gouvernementales russes vis à vis de l'extérieur et qui justifient donc en creux la nécessité d'une approche européenne fondée sur le respect et la confiance réciproques.
[Les hommes en charge de la politique stratégique Russe n'ont pas d'idéologie. Néanmoins ils respectent ce qu'ils considèrent être les règles de la realpolitik.]
[La principale inquiétude de la Russie concerne la politique extérieure et de sécurité des Etats-Unis]
[Depuis 2000, les Etats-Unis ont établi des bases en Roumanie, Bulgarie et en Asie Centrale, envoyé du personnel pour entrainer et équiper l'armée géorgiene et se sont régulièrement entrainés avec les forces Ukrainienes en Crimée et en Ukraine Orientale. Un élargissement supplémentaire de l'O.T.A.N., surtout s'il inclue la Géorgie et l'Ukraine, serait regardée par les leaders militaires et politiques russes comme une provocation évidente.]
[Depuis le milieu des années 90, les stratèges russes ont pris note de la propension US à utiliser une force militaire massive pour atteindre leurs objectifs politiques décisifs. Les bombardements des Etats-Unis et de l'O.T.A.N. Sur les serbes de Bosnie a marqué de début de tendance, la guerre aérienne de l'organisation Atlantique contre la Yougoslavie au-dessus du Kosovo a été un momment critique et l'invasion de l'Irak a confirmé cette politique.]
[Moscou a également réalisé que le Conseil des Nations Unies (ONU), ou elle dispose d'un véto, et même l'O.T.A.N., au sein duquel plusieurs pays remettent en cause les politiques états-uniennes, ne représentaient plus vraiement une contrainte pour Washington. ]
[Moscou a remarqué le dédain américain envers les accords de contrôle de l'armement. Le retrait opéré par l'administration de George Bush du traité antimissiles A.B.M. et son refus initial de poursuivre la réduction des armes stratégiques ont été interprétés comme symbolisant le désir US de repousser toute contrainte.]
[Les russes croient que les Etats-Unis pourraient utiliser leur faiblesse (celle des russes) à leur avantage. L'élargissement de l'O.T.A.N. Et le destin du traité sur les Armes Conventionnelles en Europe (C.F.E.) sont cités comme exemples.²]
[Les stratèges russes pensent que l'Union Européenne continuera d'avoir une politique incohérente dans les temps qui viennent et ne la considèrent pas comme un facteur stratégique en Europe.]
[Les russes ont conclu que la promotion de la démocratie ne porte pas les démocrates au pouvoir, mais peut aider les radicaux islamites à renverser les régimes autoritaires historiques et provoquer des déstabilisations.]
Etude publiée en Novembre 2007
*Dmitri Trenin a servi dans les armées soviétiques puis russes. Il est membre de la Fondation Carnegie pour la Paix Internationale (Carnegie Endowment for International Peace), think tank (fondation de recherche) très influent à Washington.
²Vladimir Poutine vient de confirmer le retrait, temporaire pour le momment, de la Russie du traité F.C.E..
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